Le témoignage d'une infirmière:

Publié le par Coquelikosafrane


Courrier qui passe de mail en mlail entre hospitalier ; donc accessible à tout un chacun ; d'autant plus à ceux qui passent sur mon petit espace virtuel ! :


 Je  suis assez catastrophée en ce moment, car dans aucun média, aucune  presse, même dans les discours de nos chers  politiques, personne ne  parle de ce qui se passe du côté de l'hôpital public...

 Et pourtant, moi  qui le vis de  l'intérieur, je vous garantis qu'il y a de quoi sauter au plafond (peut-être autant que les fautes d'orthographe dans ce mail, je  m'en excuse...!).

 Tout ce qui va suivre est un peu compliqué, peut-être, mais  nécessaire pour vous expliquer ce qui se passe sur le  terrain.


 Je suis infirmière dans un service de Médecine adulte (Médecine  interne et thérapeutique, pavillon 5, hôpital Bellevue à  St-Etienne) avec une  capacité d'accueil de 21 patients, dont  95% est muté directement des urgences. Autrement dit, la  plupart ne sont pas encore très stabilisés  sur le plan médical et ont donc besoin d'une surveillance étroite et  efficace de la part des infirmiers et aide-soignants.

 Les femmes de  ménage (ASH) ont elles aussi un rôle important, car au détour d'un  couloir ou pendant qu'elles nettoient une chambre, elles peuvent être les  premiers signaux d'alarme d'un patient en détresse. Sans parler de leur  travail  primordial pour assurer l'hygiène des services, rôle majeur  dans la lutte des infections nosocomiales.



 Nos équipes s'organisent ainsi : (les équipes de jour et de nuit  sont  indépendantes, je ne travaille que le jour  matin-soir) :

 2  infirmières + 2 aide-soignantes + 1 ASH le  matin
 2  infirmières + 2 aide-soignantes + 1 ASH le  soir
 1  infirmière + 1 aide-soignante la  nuit


 Ceci est ce qu'on appelle le service minimum, autrement dit, c'est le  minimum réglementaire pour assurer la sécurité des  patients. Or il faut  savoir que nous n'avons jamais de  personnel en plus et que la tendance
 actuelle est de nous  faire tourner en sous-effectif de manière presque  systématique les soirs et les week-end, soit un seul  infirmier pour 21  patients.


 Depuis 2 mois, une de mes collègues infirmières a démissionné et  n'est  pas remplacée, une autre est en arrêt de travail qui  risque d'être  prolongé et n'est pas non plus  remplacée. Nous ne sommes donc plus que 6  infirmiers au lieu de 8 à assurer un roulement sur 4 semaines, jours de  semaine, week-end et fériés compris. Alors nous effectuons 1  puis 2 puis  3 week-end supplémentaires (nous en travaillons déjà 2 sur 4   habituellement) et ainsi de suite pour que le service tourne, avec des  jours de repos qui sautent et des alternances de rythme incessantes. Si  bien qu' il devient  impossible de prévoir quoi que ce soit en dehors de
 la vie au CHU, sous peine de devoir annuler au dernier moment pour cause  : boulot!


 Samedi dernier, une autre collègue s'est arrêtée  et, étant la seule  infirmière du soir, il n'y avait donc personne pour prendre la relève du  matin... C'est un  infirmier des urgences qui a été détaché de son  service pour venir dans le nôtre, qui a assuré les soins de nos 21  patients, alors qu'il ne les connaissait pas, et qui a dû faire face en
 plus à une situation d'urgence vitale de l'un d'eux...


 Une des ASH est arrêtée depuis 1 an en étant remplacée de  manière très  ponctuelle, obligeant les 3 ASH restantes du  service à se partager un  roulement sur 4 semaines, jours de  semaine, week-end et fériés compris.
 Leur tâche est de  nettoyer à elles seules, tous les jours, la totalité  des 16 chambres du service de fond en comble (vitres, mobilier,  murs,  WC), les bureaux médicaux, les pièces de vie (office, douche, WC,
 couloirs), la salle de soins...


 Il  faut savoir que le CHU de St-Etienne est en pleine  réorganisation,  puisqu'un gros complexe est en fin de construction à l'hôpital Nord,  promettant parait-il des technologies de pointe, des locaux modernes et
 surtout des soins efficaces et de qualité...


 Alors expliquez-moi comment être à la hauteur de ces exigences  quand le  personnel est déjà largement en sous-effectif?  L'hôpital refuse  d'embaucher, car déficit budgétaire, mais  préfère faire appel à  l'intérim, qui coûte plus cher que des contractuels...


 Hier, j'étais normalement en 'repos' et j'ai passé une bonne  partie de  ma journée à démarcher la Médecine du Travail, les syndicats et à parler  avec notre chef de service, pour essayer de trouver des solutions pour
 que notre direction nous entende... 

Nous sommes, par chance, soutenus par notre chef de service, qui connaît la valeur de notre travail et sait que nous ne  protestons pas pour rien. Il nous connaît suffisamment pour lui même remuer ciel et terre pour qu'on s'occupe du sort  des soignants à l'hôpital. Il nous soutient par ce que  lui-même est très inquiet de la situation et voit notre gouvernement asphyxier le service public hospitalier, or lui  a choisi de travailler au CHU par foi en ce service public et dans le respect du serment d'Hippocrate.


Je dors très mal et pour être honnête je pense au boulot constamment. J'ai peur que le stress me fasse oublier un soin, que la pression m'empêche de prendre le temps avec un  patient déprimé, que la fatigue me fasse faire un mauvais calcul de dose,  administrer un produit au mauvais patient...  J'ai peur que ce métier que j'aime me transforme en assassin, involontairement, parce qu'on aura laissé la  situation se dégrader. Parce que nous     sommes tous responsables : je suis l'infirmière d'aujourd'hui mais nous sommes tous les patients de demain. VOUS pouvez être au bout  de ma seringue, ou votre mari, votre enfant, votre proche.  Je vis l'insécurité dans mon travail, alors que je le maîtrise pourtant. Mais je suis humaine avant  tout.


 Vous serez ceux qui pâtirez du manque de soignants dans les services : je n'aurai pas pu prendre le temps de vous donner des nouvelles du patient que vous aimez, je n'aurai pas pu gérer 2 situations d'urgence à la fois... Faut-il attendre  qu'il y ait des morts pour réagir et prendre conscience de ce qui se passe dans les hôpitaux???


       Aujourd'hui,  j'ai besoin de vous. Merci de bien vouloir transférer ce mail de manière la plus large possibl e, pour informer le  plus de monde possible. Si vous connaissez des personnes du  monde hospitalier, journalistique, politique ou autre,  n'hésitez pas à les solliciter.
       Il  faut se mobiliser en masse pour être plus efficace, moi  toute seule, je n'intéresse personne.'


       Merci pour votre attention!



Hot Glitters


Publié dans Un peu de paramédic.

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L
 Situation identique en  Belgique, on presse les infirmiéres comme un citronarrivera un jour qu'il n'y aura plus rien a pouvoir presser.Faudrait qu'elles s'arretent de remplir la paperasses, qui sert aux hopitaux à recevoir les subsides ainsi les administrateurs se réveillerait peut étre,s'ile ne voient plus les subsides arriver. et elles auraient unpeu plus de temps au chevet du malade, plutot qued "etre devant les grilles de questions à répondre chaque jour. sur papier ou ordinateur.une veritable pieuvres et encore plus assez de braspour réaliser correctement son métier. 
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